Pour un dialogue national inclusif et souverain : Quelques principes directeurs (Ibrahima Sanoh)

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Le dĂ©bat sur la transition est malheureusement caractĂ©risĂ© par l’ennui , la violence verbale et les procĂšs d’intention. Nous devons pourtant y sortir pour le bien de la transition en cours qui ne doit pas Ă©chouer et pour aussi le bien du pays qui est Ă  la recherche du temps perdu.
Certains politiques et acteurs de la sociĂ©tĂ© civile plaignent la mauvaise foi des autoritĂ©s de la transition, du PrĂ©sident de la transition, ce qui est un mauvais procĂšs tant l’initiative du dialogue n’incombe pas au gouvernement tout entier encore moins au PrĂ©sident du CNRD, tout seul. Bien que la charte de la transition dispose que la durĂ©e de la transition est fixĂ©e de commun accord par le CNRD et les forces vives, elle ne donne aucun format Ă  un tel cadre de dialogue. L’aporie Ă  laquelle conduit le dĂ©bat actuel sur la transition crĂ©e une certaine confusion sĂ©mantique entre << le cadre de concertation >> proposĂ©e par le gouvernement et le << cadre de dialogue >> auquel appellent certains politiques et acteurs de la sociĂ©tĂ© civile. Il est Ă©tabli que la concertation et le dialogue ne se valent pas . Les deux cadres ne peuvent ĂȘtre que des complĂ©ments.
Certains acteurs politiques et de de la sociĂ©tĂ© civile en appelant au dialogue dictent des conditions irrĂ©alistes et imposent leurs visions du dialogue aux autres. Pourtant , le dialogue suppose le compromis, l’ouverture et la concession. On ne peut pas appeler au dialogue en campant sur certaines positions et lignes. Les conditions comme celles-lĂ  :<< Il faut libĂ©rer les prisonniers politiques >>, << Il faut retourner Ă  Sidya ou Ă  Cellou leurs domiciles confisquĂ©s >>, etc., sont inacceptables . Ceux qui les posent comme prĂ©alables au dialogue pourraient simplement appeler au respect de la loi , de l’indĂ©pendance de la justice, du principe de la prĂ©somption d’innocence et du droit des justiciables au procĂšs Ă©quitable. Aussi , il est Ă  plaindre que ceux qui appellent au dialogue n’appellent qu’au dialogue sans rien proposer : ni du format, ni du mandat, ni des principes, ni des valeurs.

Pour ma part , on ne peut pas appeler au dialogue en appelant par la mĂȘme Ă  la rue . Soit on appelle Ă  la rue , alors on n’est pas candidat au dialogue. Soit on appelle au dialogue et alors on le fait avec instance constante.
Je crois au dialogue et ne rĂ©pondrai jamais Ă  l’appel Ă  la rue . Je souhaite que le dialogue national rĂ©ussisse et que la transition tienne ses promesses. Comme je ne peux y contribuer que par les idĂ©es, alors , Ă  travers cet article , je m’efforce d’énoncer certains principes dont la prise en compte permettrait de relancer le dialogue national auquel tant d’acteurs appellent de leurs vƓux . Ces principes portent sur le format du cadre de dialogue , son mandat, de sa souverainetĂ©, de ses instances , des rĂšgles de bonne conduite devant y ĂȘtre observĂ©es.

Principe 1: Du format du cadre de dialogue

Le cadre de concertation ne permettra pas de crĂ©er un consensus fort sur la durĂ©e de la transition et de son contenu . La concertation pourra porter sur des sujets Ă©parses et les avis des acteurs ne pourraient s’imposer aux autoritĂ©s qui les demandent . Il faut donc crĂ©er un cadre de dialogue inclusif et souverain.
Le format du cadre de dialogue Ă  instituer ne doit pas ĂȘtre l’émanation dune seule entitĂ©. Il doit ĂȘtre la rĂ©sultante d’une dĂ©cision amĂ©liorĂ©e par l’échange et concertĂ©e. Alors , le cadre de concertation en vigueur pourrait servir de cadre de dĂ©finition du format du dialogue national inclusif et souverain Ă  instituer. Il n’est pas question de relancer le cadre de concertation en vigueur et mal de rĂ©sultats, mais de son utilisation pour dĂ©finir de façon.

Principe 2 : Du mandat du cadre de dialogue

Le cadre de dialogue doit ĂȘtre une assise entre le CNRD et les forces vives en vue d’un consensus sur la durĂ©e de la transition. Son objectif principal est d’adopter de façon consensuelle une vision nationale sur le contenu et la durĂ©e de la transition. Le dialogue doit aussi aboutir Ă  : la dĂ©finition de la loi Ă©lectorale et du dĂ©coupage Ă©lectoral, la dĂ©finition de l’organe devant organiser les prochaines Ă©lections, la dĂ©finition des rĂ©formes essentielles Ă  tenir pendant la transition pour le retour Ă  l’ordre constitutionnel , la dĂ©finition du mĂ©canisme de suivi de la mise en Ɠuvre des rĂ©solutions du dialogue national.

Principe 3 : De la souveraineté du cadre du dialogue

Le dialogue national doit ĂȘtre souverain ; les problĂšmes guinĂ©ens requiĂšrent des solutions guinĂ©ennes non celles importĂ©es . Le cadre de dialogue doit ĂȘtre compĂ©tent pour : adopter son ordre de jour, veiller Ă  la reprĂ©sentativitĂ© des acteurs, mettre en place l’organisation qu’il jugera efficace, dĂ©finir la durĂ©e de la transition, mettre en place les commissions indĂ©pendantes avec des mandats spĂ©cifiques.

Principe 4 : Des organes du cadre de dialogue

Pour que le cadre de dialogue produise des rĂ©sultats escomptĂ©s , il faudra aussi les acteurs se mettent d’accord sur ses organes dĂ©libĂ©rants. Il pourrait ĂȘtre composĂ© d’une assemblĂ©e plĂ©niĂšre, d’un prĂ©sidium, des commissions thĂ©matiques et d’une commission ad hoc.

L’assemblĂ©e plĂ©niĂšre est l’instance qui rassemblera tous les participants au dialogue : les membres du CNRD ou ses reprĂ©sentants pouvant ĂȘtre civiles , les reprĂ©sentants des forces vives, le facilitateurs, et d’autres acteurs comme les membres du G5. Cette instance Ă©labore le rĂšglement intĂ©rieur et adopte les synthĂšses des travaux.

Le prĂ©sidium quant Ă  lui est l’instance de direction des dĂ©bats et des travaux. Il doit avoir Ă  sa tĂȘte un prĂ©sident avec des vice-prĂ©sidents . Quant aux commissions thĂ©matiques, ce sont des instances chargĂ©es d’examiner les sujets posĂ©s par le cadre de dialogue et ses acteurs. Les commissions ad hoc peuvent ĂȘtre instituĂ©es par le prĂ©sidium pour fournir un soutien et une expertise aux participants et aux commissions thĂ©matiques . Ces commissions ad hoc peuvent ĂȘtre composĂ©es des membres externes au cadre de dialogue.

Principe 5 : De la prise de décision

Les dĂ©cisions des commissions thĂ©matiques ou de l’assemblĂ©e plĂ©niĂšre doivent ĂȘtre adoptĂ©es de façon consensuelle . Mais le consensus pourrait bien ĂȘtre un vƓu pieux qu’il deviendrait difficile Ă  atteindre. A dĂ©faut du consensus , il faudrait que le cadre de dialogue dĂ©finisse un seuil d’adoption des dĂ©cisions, cela Ă©viterait tout blocage et les pertes de temps.
Tous les participants au dialogue ne doivent pas avoir des droits de votes , certains n’y ont que le statut de membres visiteurs par consĂ©quent ils ne doivent pas interfĂ©rer dans la prise de dĂ©cision.

Principe 6 : Des rÚgles de bonne conduite et du régime de sanctions

Les participants au dialogue national inclusif et souverain doivent observer un certain nombre de rĂšgles de bonne conduite . Ils doivent participer de bonne foi aux assises du dialogue. Ils doivent respecter l’opinion des autres participants et Ă©viter Ă  tenir des propos injurieux, irrespectueux, diffamatoires et mĂȘme agressifs. Un rĂ©gime de sanction doit ĂȘtre adoptĂ© contre les actes de perturbations ou d’obstruction Ă  la rĂ©ussite du dialogue.

Principe 7 :De la commission de suivi de l’application des rĂ©solutions du dialogue

Les participants au dialogue doivent tirer des leçons du passĂ© ; bien souvent les rĂ©solutions adoptĂ©es au cours d’un dialogue ne sont pas suivies et appliquĂ©es. Il serait intelligent d’envisager la constitution d’une commission de suivi de l’application des rĂ©solutions du dialogue national , inclusif et souverain Ă  instituer.

Ibrahima SANOH

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