Depuis quelques temps, la Guinée sombre dans une crise politique qui n’a que trop durée.
Allant de la tuerie des citoyens lors des manifestations en passant par l’indifférence des autorités face à ces actes, jusqu’à l’installation des postes armés sur l’axe Hamdallaye-Kabgelen, les faits semblent faire du bruit dans la cité.
Au cours d’une interview accordée à notre rédaction, Dr Fodé Oussou Fofana, vice-président de l’UFDG, ne cache pas son indignation. Suivez-le sous la plume de Bah Fatoumata Diaraye.
-Bonjour honorable !
Bonjour Madame.
Honorable, dites-nous, votre impression sur la crise socio- politique qui sévit dans le pays depuis quelques temps?
Mon impression est que nous ne sommes plus dans une République mais plutôt dans une jungle. Les institutions n’existent plus, les juridictions ne fonctionnent plus. Nous avons un président qui est encore le président d’un parti politique qui se mêle des élections communales. Les gens vivent dans la misère et dans précarité. Quand on part à Kamsar par exemple, on a l’impression que c’est l’apartheid. Vous arrivez dans la cité, les gens ont tout et au centre-ville, les gens souffrent. Ils n’ont ni d’eau ni d’électricité. Nous sommes dans un pays où pour organiser une simple élection communale, il faut des manifestations. C’est une honte pour ce pays. Nous sommes dans une gouvernance de merde qui ne dit pas son nom.
Selon vous l’installation des P A sur l’axe Hamdalaye-Kagbelen ne restreint-elle pas votre seule voie de recours pour vous faire entendre qui est celle de manifester?
Les PA sont une honte pour la police et la gendarmerie. Dans un pays normal, les militaires n’interviennent qu’en cas d’urgence. La présence des militaires à côté des policiers et gendarmes prouve à suffisance que ce pourvoir est incapable d’assurer la sécurité de sa population. Le ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation avait dit que les PA seraient installés dans tout Conakry, mais seul l’axe s’est vu militarisé pour contre carrer l’opposition. Ils doivent savoir que l’axe n’est pas le seul endroit où l’on peut manifester. Je suis fier des jeunes de l’axe car ils sont prêts à tout pour ce pays.
Depuis l’arrivée du président au pouvoir en 2010, on a enregistré 103 morts lors des manifestations de l’opposition. Où en est l’enquête pour rendre justice aux victimes?
-Je le dis et le réitère nous ne sommes pas dans un Etat normal. Sinon dans une manifestation, les forces de l’ordre sont censés encadrer et veiller sur les manifestants pour ne pas qu’il y ait de débordement. Et puis en plus ils ne doivent utiliser que des armes conventionnelles. Vous avez vu ce qui se passe en France avec les gilets jaunes, 36.000 personnes dans la rue. On voit des véhicules caillassés, des maisons pillées et des boutiques brûlées. Est ce qu’on a tué un manifestant? Non! Ça c’est un Etat de droit. Même si les manifestants sont avec des cailloux, on ne doit pas leur tirer dessus. Le gouvernement est responsable de ces morts puisqu’il en est le commanditaire, alors il ne peut pas y avoir de justice. Rien ne justifie qu’on prenne des armes de guerre contre la population. Alpha Condé ne s’en soucie même pas . Je vous donne un exemple, le jour où on a tiré sur deux jeunes à Wanindara, le même jour y’a un policier qui a été bastonné à mort. Le président, au lieu d’adresser un message à la nation, a préféré voyager. C’est vraiment déplorable pour notre pays.
Lors de la première journée de la session budgétaire au parlement, après le passage du ministre de la justice Cheick Sako, vous avez mentionné que la décision en terme de justice ne viendrait pas de lui mais plutôt ça viendrait d’en haut. Pouvez-vous nous éclairer davantage sur ses propos?
Il y’a eu 103 morts . Il n’y a eu ni d’enquête ni d’interpellation. Je me demande si le ministère de la justice existe réellement? J’ai dit à Cheick Sako à sa place je démissionnerais parce qu’il n’est là que par le nom et non par les actes. C’est pas lui qui gère son ministère mais le président qui décide de tout. Les juges et les magistrats n’obéissent qu’à Alpha Condé. Ce qui se passe en Guinée ne se passe nulle part ailleurs. Il n’y a même pas de haute cour de justice. Ils ne veulent pas la mettre en place au risque de se faire poursuivre.
Pensez-vous que le chronogramme des manifestations établit par l’opposition sera respecté vu que les manifestations sont interdites?
Il faut faire la différence entre autorisation et information. L’article 10 de la constitution est très clair. Manifester est un droit consacré par la constitution. Les organisateurs ont une seule obligation c’est d’informer le gouverneur et lui, doit faire accusé de réception. Nous n’avons pas besoin de son autorisation ou venir se prosterner devant lui les mains jointes pour demander une autorisation. Donc s’il ne répond pas favorablement ou nous donner une bonne raison de ne pas manifester, cette interdiction est nulle et de nul effet.
Quel appel ave- vous à lancer à l’endroit de vos militants et sympathisants ?
J’appelle nos militants à rester mobilisés pour mener le combat à bout. Tant que le pays ne sera pas démocratique, tant que les droits humains ne seront pas respectés et tant que la dignité des guinéens ne sera pas considérée, on ne baissera pas les bras. Il faut que les gens comprennent que ce combat n’est pas ethnique encore moins communautaire, c’est un combat purement politique et pour le bien être des guinéens.
Merci honorable !
Merci à vous madame !
Interview réalisée par Fatoumata Diaraye Bah pour friaguinee.net