Apparu au début des années 2000, le phénomène de taxi-moto s’est vite emparé du cœur des usagers de la route qui parcouraient plusieurs kilomètres à pieds.
Facile à intégrer, n’importe qui peut exercer ce métier. C’est pourquoi, vu la situation socioéconomique de la ville de Fria, ils sont des centaines de jeunes élèves à se tourner vers la conduite des taxi-motos pour subvenir à leurs besoins.
Ces élèves, parfois mineurs, fonctionnent la nuit et la journée de dimanche.
Ousmane Diallo, élève de la 12ème année, exerce cette activité depuis plusieurs années. Il travaille dur pour subvenir aux besoins de sa famille.
« J’ai commencé à conduire la moto en 2012 quand je faisais la 7ème année. Quand l’usine a fermé ses portes, mon père avait une moto, puisque je suis son premier garçon, malgré mon jeune âge, je lui ai dit de me laisser conduire la moto la nuit pour avoir le prix de notre déjeuner. Je rentrais avec au moins 20.000 fg chaque nuit, mon père a vu que ça l’aidait beaucoup, il m’a définitivement laissé la moto. Chaque jour après les cours, je sors et je rentre à 23 heures. Actuellement je peux déposer chaque jour 30.000 ou 40.000 fg à mon père et c’est grâce à ça que ma famille n’a pas connu la galère de Fria, je ne redouble pas mes classes aussi » explique le jeune homme très dégourdi.
Mohamed Diaby, élève de la 10ème année dans une école privée, paie ses études grâce à cette activité.
« C’est moi qui ai dit à ma mère de prendre une moto à crédit pour moi parce que je ne veux plus étudier dans une école publique. Elle a trouvé la moto en 2016 à 6 millions, j’ai travaillé et rembourser le prix de la moto pendant 9 mois, maintenant elle est à moi, je me prends entièrement en charge et fait des cadeaux à ma maman grâce à cette moto » se félicite-t-il.
Les encadreurs de ces élèves ne voient d’un bon œil cette attitude des parents. Ils accusent les parents d’avoir démissionner de leurs devoirs parentaux et d’être les principaux acteurs des échecs scolaires de leurs progénitures.
« On constate à travers la ville que beaucoup d’élèves sont devenus conducteurs de taxi-motos, quand on leur demande pourquoi ils le font, ils disent que c’est pour aider leurs parents. Moi je déplore cette attitude des parents, c’est aux parents de soutenir leurs enfants jusqu’à un certain âge. Ces enfants je vous avoue qu’ils ne sont pas de bons élèves, ils n’ont pas la tête aux cours, ils ne pensent qu’à l’argent, leurs résultats ne sont pas bons » fustige Issiaga Sylla, enseignant.
Les parents eux se réjouissent d’avoir eu des enfants capables de leur venir en aide.
« Je ne vois aucun mal à ça. Si mon enfant m’aide c’est parce qu’il est conscient de ma situation, ça ne l’empêche pas d’étudier » rétorque Mariama Camara, mère d’un élève conducteur de taxi-moto.
L’avènement des taxi-motos a contribué à la réduction de l’oisiveté puisque moins de jeunes sont visibles dans les quartiers, assis autour d’une marmite de thé.
Djénabou Diallo
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