Le président sortant Macky Sall est le favori de l’élection présidentielle sénégalaise qui a lieu dimanche 24 février, alors que le Conseil constitutionnel a invalidé les candidatures des deux principaux opposants.
Dimanche 24 février, le président sénégalais Macky Sall (Alliance pour la République) remettra son mandat en jeu, mais l’élection semble gagnée d’avance. Dans la démocratie la plus stable d’Afrique de l’ouest, habituée aux débats et à l’opposition démocratique, c’est la première fois que les candidatures sont si peu nombreuses: cinq rivaux briguent le poste, depuis que les candidatures des deux premiers opposants, Khalifa Sall (Parti socialiste, gauche) et Karim Wade (Parti démocratique sénégalais, centriste), ont été invalidées par le Conseil constitutionnel à la mi-janvier.
Khalifa Sall, ancien maire populaire de Dakar, purge depuis 2 ans une peine de cinq années de prison pour «escroquerie portant sur le denier public». Le Conseil constitutionnel a refusé sa candidature, arguant qu’il «ne peut plus se prévaloir de sa qualité d’électeur». Karim Wade, fils de l’ancien président Abdoulaye Wade (2000-2012), a été condamné à six ans de prison en 2015 pour «enrichissement illicite». Il a été gracié par le président Macky Sall et vit depuis en exil au Qatar. Les magistrats ont estimé que ces condamnations les empêchaient de briguer un mandat présidentiel. L’opposition dénonce l’influence du président sur le Conseil constitutionnel, ce que dénient ses sympathisants.
Le boycott de d’Abdoulaye Wade
Face à l’exclusion de son fils de la course présidentielle, l’ancien président Abdoulaye Wade ne décolère pas. Le 7 février, dans un discours tenu à ses partisans, il appelait ses compatriotes à boycotter le scrutin et à brûler cartes d’électeurs et listes électorales. «Nous décidons de nous attaquer aux bureaux de vote pour qu’il n’y ait pas d’élection. Il suffit de prendre un peu d’essence pour brûler la liste des électeurs. Et ce n’est pas un délit. Ce sont des bulletins de fraude, qui participent à un système de fraude. C’est le devoir des citoyens de les détruire», a-t-il déclaré.
L’opposition regrette cette prise de position tranchée et violente. Le PDS d’Abdoulaye Wade est la première force d’opposition du pays et Karim Wade était crédité de 15% avant la décision du Conseil constitutionnel. Une consigne de vote donnée par l’ancien président pourrait ainsi renforcer la candidature d’un opposant.
Les enquêtes d’opinion sont interdites en période électorale au Sénégal, mais un sondage datant de novembre dernier annonçait une large victoire de Macky Sall, avec près de 45% des voix. Avec un vaste projet de développement visant à créer un «Sénégal émergent» d’ici à 2035 et une croissance de 6% par ans contre 2% au début de son mandat, ses partisans saluent une réussite économique. Une réussite à nuancer, dans un pays où une large partie de la population est au chômage.
Face à lui, aucun des quatre opposants ne dépassait les 15% d’intentions de vote dans les dernières prévisions de novembre.
Idrissa Seck, ancien premier ministre d’Abdoulaye Wade (2002-2004) et candidat sous la bannière de son parti Rewmi (libéral), rassemble les espoirs d’une large partie de l’opposition et bénéficie du soutien officiel de Khalifa Sall. Avant que la candidature de ce dernier ne soit repoussée, Idrissa Seck était crédité de 8% des intentions de vote. Mais la candidature du candidat antisystème Ousmane Sonko pourrait en séduire plus d’un. Cet ancien inspecteur des impôts s’était fait connaître en 2015 en dénonçant la corruption fiscale des élites sénégalaise et séduit particulièrement chez les jeunes. Un atout de poids dans un pays où plus de 60% de la population a moins de 25 ans. En novembre, il était crédité d’environ 15% des voix.
Les deux autres opposants, Issa Sall et Madicke Niang, semblent moins séduire les électeurs. Professeur d’informatique et fondateur de l’université privée de Dakar, Issa Sall concourt pour le Parti de l’Unité et du Rassemblement (conservateur musulman). Madicke Niang est un dissident du PDS, exclu du parti par Abdoulaye Wade pour avoir osé concurrencer son fils dans la course présidentielle.
LE FIGARO