Une blogueuse tunisienne a été condamnée à six mois de prison ferme ce mardi pour avoir parodié une sourate du Coran, intitulé « Sourate Corona », pour inciter au respect des gestes barrières. Elle a été reconnue coupable « d’atteinte au sacré », « atteinte aux bonnes mœurs et incitation à la violence » et devra s’acquitter d’une amende de 2 000 dinars, soit 650 euros. Cette condamnation relance le débat sur la liberté de croyance et d’expression en Tunisie.
Emna Charki a été condamnée en vertu de l’article 6 de la constitution tunisienne votée en 2014. Mais si le texte stipule que « l’Etat protège la religion », il garantit aussi « la liberté de croyance et de conscience », en vertu de laquelle elle avait publié sa parodie.
Des valeurs qu’elle a défendues ce mardi à sa sortie d’audience, au micro de notre correspondant à Tunis Michel Picard. « Où est la liberté d’expression ? Où est la liberté des croyances ? Où sont les droits des femmes ? Où est la justice ? C’était juste pour rire. Comme n’importe qui, qui voit une publication qui le fait rire, il la publie. En plus de ça, elle n’incite pas à la haine, elle invite les gens à se laver les mains. Quand même, il faut lire le contenu. Lorsqu’on est athée et lorsqu’on le publie ou que l’on rit sur la religion, on risque la prison. Je ne regrette rien, je n’ai pas changé d’avis, je ne changerai pas, je ne vais pas me taire et je vais me battre. Je reçois des menaces de mort, de décapitation, de viol. Et c’est moi qui vais faire de la prison et non pas ceux qui m’ont menacé. Ça n’est pas logique, et ça n’est pas la justice. Si j’ai six mois de prison pour une publication, je peux considérer que cet État est un État islamiste. »
Avant même sa condamnation, la jeune femme et sa mère avaient été mises à la porte par le propriétaire de leur logement.
Le cas d’Emna Charki n’est pas la première affaire du genre. Un autre jeune Tunisien, Jabeur Mejri, avait été condamné en 2012 à sept ans et demi de prison pour troubles à l’ordre public après avoir diffusé sur Internet des textes et des dessins considérés comme insultants pour le prophète Mohamed et l’islam. Il avait été gracié deux ans après sa condamnation.
Avec RFI