Ils sont morts à la suite de torture ou d’autres mauvais traitements, notamment de mauvaises conditions de détention, selon l’ONG, alors que les autorités évoquent des décès naturels.
L’organisation humanitaire Human Rights Watch (HRW) a appelé à mener une enquête approfondie sur la mort en détention de quatre opposants guinéens, a fait savoir l’ONG dans un communiqué, mercredi.
HRW appelle « l’ONU et l’Union africaine (UA) (…) à fournir une assistance technique et autre dans le cadre de l’enquête guinéenne, ou de mener leurs propres enquêtes si les autorités guinéennes n’agissent pas », peut-on lire dans le texte mis en ligne ce mercredi.
« La mort en détention de quatre prisonniers politiques en seulement deux mois montre que la santé et la sécurité des prisonniers sont gravement menacées en Guinée », a relevé Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur l’Afrique centrale à Human Rights Watch.
« Les autorités guinéennes, avec le soutien de partenaires internationaux, devraient enquêter de toute urgence sur les décès récents de prisonniers et remettre en liberté tous ceux qui sont détenus uniquement pour avoir exercé leurs droits garantis par la Constitution à manifester pacifiquement et à s’exprimer politiquement », a souligné la chercheuse.
En Guinée, quatre personnes dont trois militants de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), le principal parti d’opposition dirigé par Cellou Dalein Diallo, sont mortes entre novembre 2020 et janvier 2021 pendant leur détention provisoire à la prison centrale de Conakry la capitale, a rappelé HRW.
Les quatre hommes dont Roger Bamba, membre de la cellule de communication et responsable des jeunes de l’UFDG, faisaient partie « des centaines de partisans ou sympathisants présumés de l’opposition arrêtés lors du référendum de mars 2020 et de l’élection présidentielle d’octobre 2020 », a souligné l’ONG.
Le gouvernement guinéen avait annoncé dans un communiqué que l’opposant Bamba serait mort d’« une cirrhose du foie qui a ballonné son ventre et enflé (ses) pieds ».
D’après HRW, « des membres des familles des victimes, leurs avocats et des militants des droits humains ont déclaré que les quatre personnes étaient mortes à la suite de torture ou d’autres mauvais traitements, notamment de mauvaises conditions de détention et du manque d’accès à des soins médicaux adéquats pour de graves problèmes de santé ».
HRW qui se donne pour mission de défendre les droits de l’homme et le respect de la déclaration universelle des droits de l’homme, a estimé que gouvernement guinéen devrait garantir une enquête approfondie, indépendante et transparente sur les circonstances de ces décès.
« Ces décès dans des circonstances suspectes soulèvent de graves préoccupations et devraient faire l’objet d’une enquête rapide et approfondie », a déclaré Ilaria Allegrozzi.
Roger Bamba, âgé de 40 ans, est décédé le 17 décembre 2020. Le porte-parole du ministre de la Justice a déclaré que la cause de la mort était une cirrhose du foie, mais l’épouse de Bamba a accusé le gouvernement de « crime d’État », affirmant que Bamba n’avait pas reçu les soins médicaux adéquats après être tombé malade pendant sa détention.
Ibrahima Sow, âgé de 62 ans, est décédé un mois plus tôt, le 16 novembre. Les autorités guinéennes ont déclaré que sa mort était liée à un diabète, mais sa famille affirme qu’il est décédé des suites de sa torture en détention.
Le 5 décembre, Lamarana Diallo est décédé à l’âge de 22 ans au domicile de sa sœur, le jour de sa remise en liberté de la Maison centrale de Conakry. Des membres de sa famille et un témoin ont assuré que les gardiens de prison avaient ramené Diallo chez lui dans un état de santé déplorable et qu’il était mort des suites de sa torture en détention, une accusation rejetée par le gouvernement.
Oury Barry, 21 ans, est décédé le 16 janvier. Sa famille et son avocat ont déclaré que sa mort était survenue dans sa cellule et qu’il n’avait pas reçu de soins médicaux appropriés pour les mauvais traitements et la maladie dont il avait souffert en détention, mais les autorités ont soutenu qu’il était mort à l’hôpital de « causes naturelles ».
Les quatre opposants se trouvaient tous en détention provisoire à la Maison centrale de Conakry, « notoire pour ses mauvaises conditions d’incarcération et sa surpopulation : conçue pour 300 détenus, elle en accueille actuellement plus de 1 500 », selon HRW.