L’interpellation d’Ibrahima Khalil Kaba a-t-elle un sens ?

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Par Saliou Camara

L’interpellation de l’ex Directeur de cabinet de cabinet du président déchu Alpha Condé, Ibrahima Khalil Kaba, est un pied de nez à l’histoire d’un pays qui cherche un nouveau départ, depuis plusieurs décennies.
Sans cogiter sur la portée d’un sonore et d’une vidéo qui ont plus tortillé les méninges de politiciens et autres « bloggeurs » en manque de sujets, ce coup de théâtre disproportionné est révélateur d’une certaine frilosité qui n’a pas lieu d’être. Venant du PRAC, on a entendu pire !
Les éléments mis en cause, au cas où la version de presse tiendrait la route, révèlent une pathétique tragi-comédie mettant en scène un homme au crépuscule de sa vie et qui cherche à recoller (ou décoller c’est selon) les morceaux d’un choix politique qui s’est avéré désastreux : le « troisième mandat » contre lequel Khalil a tenté de l’en dissuader au point d’être « gentiment » écarté pour se fixer aux AE.
Encore que, selon les indiscretions, la vidéo et le sonore ont été faits avec l’accord de l’ex président Alpha Condé…
Qu’un homme d’état comme Ibrahima Khalil Kaba, soit au centre des attentions au point d’être perçu comme un candidat sérieux au fauteuil présidentiel, lorsque la junte acceptera de lâcher la bride, devrait plutôt être une dynamique à encourager dans un contexte où il est difficile de prédire de quoi demain sera fait.
En effet, il est très rare, en République de Guinée, de voir un jeune adulte (environ 50 ans) parfaitement polyglotte rassembler à la fois la compétence (Phd en mathématiques appliquées), la rigueur, une immense capacité de travail, l’expérience de la gestion de l’état, l’intégrité, l’honnêteté intellectuelle et un réseau d’amis à l’international (une flopée de chefs d’états et de gouvernement) qui ferait pâlir d’envie tous ceux qui lorgnent sur le fauteuil présidentiel. Certains ont duré au pouvoir mais ne sont pris au sérieux nulle part ! Voudrait-on gaspiller un tel potentiel sur l’autel de querelles inutiles ? Ce serait assurément une erreur.

Au demeurant, cette histoire devrait plutôt être relativisée et ramenée à sa juste proportion : hormis des critiques acerbes et prévisibles de ceux qui attendaient la junte au tournant (un exercice auquel les militaires au pouvoir devraient plutôt s’habituer), il n’y a eu pas eu plus de conséquence que quand un ex PM, décrié aussi bien par l’opposition que – comme on le constate – par une partie des militants de l’ex-parti au pouvoir, s’est autoproclamé « dauphin » d’Alpha Condé. Soit ! Seulement voilà : en quoi une personnalité aux méthodes prévisibles, à la stratégie connue, qui a crevé le petit écran de notre Radiotélévision nationale (RTG) pendant 5 ans, empilant annonces sur annonces, promesses sur promesses, souvent sans suite et parfois sans consistance, peut-elle révolutionner le destin de ce pays ? En quoi un « homme de tous les régimes » peut-il apporter l’espoir dans le contexte actuel ?
C’est en cela qu’il serait important de réfléchir sur ce que les Guinéens veulent pour leur propre pays. Il est trop facile de se taire ou de tenter d’étouffer les aspirations légitimes des jeunes compétents et expérimentés à prendre le pouvoir, eux qui s’y sont sérieusement préparés à l’ombre des aînés, en ayant réellement la main à la pâte.
La phraséologie insipide, le trafic d’influence et les manœuvres politiciennes ne font plus recette face à la poussée d’une société qui en a marre d’être roulée dans la farine. Tous ces jeunes gens qui occupent l’espace des réseaux sociaux, des cafés populaires et des émissions interactives ne comprendraient jamais qu’au sortir de cette transition cruciale, que les Guinéens s’exclament par dépit, en lâchant désespérément une phrase du genre : « tant d’effort fourni pour que tout reste bien immobile ». Ce serait franchement dommage !

Saliou Camara

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