Le lundi 19 février 2024, à la surprise générale, le Président de la transition, par un décret lu à la télévision nationale par le Ministre Secrétaire général à la Présidence, le Général Amara Camara, a dissout le gouvernement de Dr Bernard Goumou.
Dès après la lecture du décret de dissolution, un communiqué du Comité National du Rassemblement pour le Développement (CNRD) lu par le chef d’État-major général des armées, le Général Ibrahima Sory Bangoura, a annoncé les mesures conservatoires qui s’attachent à cette décision notamment :
1. restitution des véhicules de service et d’escorte des membres du gouvernement dissous au Garage du Gouvernement sans délai ;
2. gel des comptes bancaires des ministres sortants ;
3. restitution de tous les documents de voyage au Secrétariat général de la Présidence ;
4. remise des cachets aux intérimaires désignés ;
5. démobilisation de tous les gardes corps et aides de camps.
Depuis l’annonce de cette décision de dissolution, des commentaires vont tous azimuts sur le profil que devrait avoir le prochain locataire du Palais de la Colombe et le type de gouvernement dont la transition a besoin pour réussir. Si d’aucuns sont favorables au profil d’un Premier Ministre et d’un gouvernement de technocrates, d’autres par contre pensent à un Premier Ministre venu du sérail politique, à la tête d’un gouvernement d’union nationale.
Des propagandistes sur les réseaux sociaux, eux, commencent déjà à faire virevolter en boucle sur la toile les images de personnalités dont le profil répondrait mieux, selon eux, au poste de Premier Ministre. Normal. C’est de bonne guerre ! (Rire)
S’agissant du futur gouvernement, qu’on le dise ou pas, c’est déjà la rude bataille entre adversaires qui ne se connaissent pas : les membres du gouvernement dissout qui veulent revenir et les personnes qui œuvrent dans l’ombre pour faire leur entrée. Il paraîtrait même que les actes sacrificiels sont légion depuis hier, notamment à Conakry. Est-ce vrai ? Qu’il faut « gbasser » le grand chef ou « gbasser » l’un des proches du grand chef ou « gbasser » l’un des proches des proches du grand chef pour espérer appartenir au gouvernement ?
Que les prix de consultation chez les marabouts, chiromanciens et autres détenteurs de savoirs mystiques auraient même connu une augmentation ? Que c’est la fête chez les vendeurs de bovins et caprins, tellement que les demandes sont nombreuses ?
En tout cas, simples rumeurs ou pas, ça se dit en ville. Ça s’appelle tout simplement les coulisses de la bataille pour le gouvernement. Mais, revenons à l’essentiel.
Dans un contexte aussi difficile que celui que traverse notre pays, ce n’est pas forcément la technique qui gouverne. Il faut plus de politique. Donc, le profil idéal aujourd’hui pour la primature, c’est une personnalité terne, sans ambition, prête à tout pour mettre les acteurs sociopolitiques ensemble. De préférence, un homme politique consensuel, nourri dans le sérail de la politique guinéenne, à la tête d’un gouvernement d’union nationale.
Le temps commande un tel profil de nos jours au Palais de la Colombe pour une transition apaisée et réussie.
Le prochain locataire du Palais de la Colombe devra connaitre l’histoire politique de notre patrimoine commun, tout en ayant le filament patriotique. Cela lui permettra de faire des analyses comparées et de prendre de bonnes décisions. Il doit avoir de l’aura, avoir certaines qualités et aptitudes telles que la prestance, la confiance ou le charisme. Il doit également savoir rassembler, écouter et trancher aussi. Le choix d’une personnalité clivante rendrait les choses plus difficiles qu’avant.
En outre, le prochain Premier Ministre doit être capable d’accélérer la mue du dialogue interguinéen entamé le 25 novembre 2022 pour qu’il soit plus inclusif. Il doit être un homme à poigne, très organisé, capable de faire de la concertation et du dialogue social son cheval de bataille. Bref, le prochain Premier Ministre guinéen doit être capable de répondre aux grands défis mis au premier rang de toute transition à savoir, l’organisation des élections devant aboutir au retour à l’ordre constitutionnel.
Pour tout dire, il faut aujourd’hui un homme politique à la tête d’un gouvernement d’union nationale pour non seulement décrisper l’atmosphère sociopolitique, mais également mobiliser tous les acteurs autour de la table du dialogue. Nul besoin de rappeler ici que les deux Premiers Ministres qui se sont succédé au Palais de la Colombe sont des personnalités non politiques. Donc, un homme politique consensuel serait mieux indiqué cette fois-ci à la primature.
Sayon MARA,
Juriste